Pierre et les Poissons

J’ai découvert l’Argentine il y a 5 ans et suis complètement tombé amoureux du pays, à tel point que j’essaye d’y retourne chaque année maintenant, entre janvier et mars, et souvent avec ma famille.

L’Argentine fait partie de ces destinations mythiques pour un pêcheur à la mouche et le pays est particulièrement agréable pour les européens qui y retrouvent une culture proche de la leur. 

Un voyage en Argentine commence toujours par Buenos Aires (directement et facilement accessible depuis Paris) qui est une ville incroyable : en mouvement perpétuel, très cosmopolite, très sûre et capitale des gastronomes carnivores. Je m’arrange toujours pour y passer quelques jours et profiter des nombreuses activités : visites de la ville, cours de tango, restaurants, bars, marchés, etc. Les hôtels sont nombreux et variés : de l’auberge traditionnelle à l’hôtel international (le LOI Suites est très bien) au boutique hôtel (le Faena est incroyable) à l’institution nationale (l’Alvear Palace).

Ensuite, les principales destinations de pêche depuis Buenos Aires sont au nombre de 3 (et facilement combinables dans un même séjour) : le dorado (au nord du pays), que je n’ai jamais pêché personnellement, la truite de Patagonie (destination Bariloche ou San Martin de los Andes ou El Calafate) et la fameuse truite de mer géante en Terre de Feu (Ushuaïa ou Rio Grande). Ces 3 destinations sont desservies par la compagnie Aerolinas Argentinas (qui n’est pas la compagnie la plus fiable au monde...) pour un coût assez raisonnable.

Je ne m’attarderai pas dans ce post sur la pêche à la truite en Patagonie, tellement le nombre d’opportunités est large : Rio Pico, Jurassic Lake, Correntoso, Rio Limay, etc. Je dirais simplement que je vous conseille de rester au lodge La Araucana (propriété fabuleuse de la merveilleuse Teresa de Alvear) si vous passez dans la région de San Martin de los Andes.

Passons plutôt à la truite de mer : LA destination historique est le fameux Rio Grande, accessible depuis Ushuaïa ou Rio Grande. Cette puissante rivière coule depuis les contreforts chiliens des Andes vers l’Argentine et abrite la plus importante population de truites de mer géantes au monde (au moins en densité !). Pêcher sur le Rio Grande mérite tous les superlatifs : une qualité de lodge inégalée (à ma connaissance) dans le monde, une nature brute et sublime (les Andes, la steppe, les condors, les lamas, etc), une taille de poisson hallucinante (mon père et moi avons pris de très nombreux spécimens de plus de 20 livres, un de 24 et un de 27 !!!) et des combats mémorables.

Les 2 autres rivières pour la truite de mer sont le Rio Gallegos (que je ne conseillerais pas) et l’Irigoyen qui est, elle, une destination sublime, très différente du Rio Grande.

Attardons nous sur les principales différences entre ces deux rivières : le Rio Grande est une rivière assez large et puissante balayée par de très forts vents. On pêche donc majoritairement avec du matériel «lourd» : canne à 2 mains de 13 à 15’, soie de 8 à 10 et gros frein. Les conditions de pêche sont très variables et il faut prévoir tout type de ligne : du tout flottant avec longs bas de ligne fins (10/12 lbs) pour les eaux claires et basses au très plongeant pour les grosses eaux. 

L’Irigoyen est une rivière plus récente, beaucoup plus petite que le Rio Grande. Ici, les forêts abritent du vent et on pêche majoritairement avec des cannes à une main, soie de 6 à 8, en nymphe. On peut espérer prendre, en moyenne, une dizaine de truites de mer géantes pour 6 jours de pêche, soit 2 à 3 fois moins que sur le Rio Grande. Par contre, chaque poisson pris laissera un souvenir impérissable ! Et vous pourrez aussi attraper des dizaines de robalos, qui sont des poissons d’estuaire incroyables à prendre à la mouche.

La pêche sur l’Irigoyen est nettement plus intimiste que sur le Rio Grande ; ceci est d’autant plus vrai avec le nouveau programme qui comprend un hélicoptère qui vous amènera, 2 jours dans la semaine, pêcher des rivières complètement vierges et inexplorées.

Il y a un seul lodge de pêche sur l’Irigoyen (opéré par les jumeaux Nico et Alex) alors qu’on en trouve trois sur le Rio Grande : Villa Maria, Kau Tapen et Toon Ken (du plus aval au plus amont). Les 3 sont d’excellente facture ; et pour parler encore plus franc, ils sont, sans exagération, exceptionnels, vraiment luxueux. Kau Tapen est le lodge historique, celui qui a les meilleurs parcours ; c’est le lodge du milieu de la rivière. Villa Maria est le lodge le plus en aval, celui qui a les pools les plus larges. Enfin, Toon Ken est le dernier né, celui qui est le plus proche de la frontière chilienne ; c’est un merveilleux lodge (que j’ai pratiqué plusieurs fois), avec des pools superbes. Malheureusement, c’est un lodge à éviter pour l’instant car ses pools ont été « redistribués » et il manque maintenant sérieusement de domaine à pêcher ; quel malheur…

Comme en Islande, le rythme de pêche est très intense : la pêche se pratique en 2 sessions par jour : celle du matin et celle de la fin d’après-midi, au moment de la fameuse «magic hour» (coucher de soleil). Cette « magic hour » se prolonge même par quelques minutes de pêche dans le noir, moment où les truites deviennent hyperactives et prennent de grosses mouches noires que l’ont strippe très vite sur l’eau ; sensations garanties. Un guide reste avec 2 cannes toute la journée ; la pêche est strictement en catch & release.

Les mouches utilisées sont très variées en fonction du niveau de l’eau : petites nymphes en eaux basses ; pour les eaux plus hautes, prévoir des « German Snaelda » islandaises (cf www. frances.is) et des sunray shadow. Pour information, en 2006, j’ai pris 17 de mes 18 truites du séjour sur une sunray shadow…

Bref, je recommande fortement à tout moucheur passionné d’essayer la truite de mer argentine au moins une fois. Comme pour le saumon, il y a de fortes chances pour que vous en tombiez malade pour le restant de vos jours…

Et si vous allez en Argentine et que vous avez un peu de temps à consacrer à la truite en Patagonie, voici ce qui vous attend...